M.Trappier, (ou M.Segalen),
Dans quelques minutes M.Nahon nous présentera les résultats semestriels, qu’il qualifiera sans aucun doute d’excellents, comme d’habitude.


M. Segalen, avec sa prudence de comptable désormais bien connue, se délectera de l’annonce du passage du cap des 6 milliards d’euros de trésorerie disponible. Trésorerie qui, placée en bon père de famille à 2%, génèrera 120 millions d’euros d’intérêts par an, l’équivalent de l’intéressement, la participation et la masse salariale, des ouvriers, employés, techniciens…cotisations sociales comprises !!!


Une fois le plaisir des chiffres terminé, vous n’oublierez certainement pas aujourd’hui encore de lancer quelques messages à l’attention de « l’actionnaire », « la famille », figure quasi divine, que vous remerciez chaleureusement « pour sa confiance ».


Vous serez certainement plus discrets en revanche au sujet de vos nouvelles actions gratuites, en page 20, 40 et 41 du rapport de l’expert : « nouveau plan d’attribution d’actions de performance en faveur des dirigeants de Dassault Aviation (le huitième), pour 34 500 actions », « Attribution d’actions au Président-Directeur Général et Directeur Général Délégué », « 124 570 actions ont été définitivement attribuées aux mandataires sociaux au 30 juin 2022 ».


Les salariés s’interrogent : Cette attribution est-elle réservée uniquement à deux personnes comme l’indique le tableau de la page 40 ? Cette attribution est-elle gratuite ou à tarif préférentiel ? Sauf erreur de notre part, cette distribution de 34500 actions en 2022 représente environ 4,5 millions d’euros, soit une prime de 550 euros à l’ensemble du personnel !!!


Cette excellente santé financière ne reflète pas selon nous la santé industrielle de l’entreprise.


La sous-traitance à outrance, déjà souvent dénoncée par la CGT, est en passe de devenir dangereuse pour l’entreprise. Avec un taux moyen d’intérim à 23 % dans les ateliers et de 30 % dans les études, les savoir-faire Dassault sont en voie de disparition tellement rapide que nous avons désormais du mal à croire qu’elle ne soit pas carrément souhaitée et programmée au plus haut niveau.


La cote d’alerte, au-delà de laquelle Dassault ne serait plus Dassault, est aujourd’hui atteinte.


Le turn-over des intérimaires, le manque d’implication des centaines de salariés précaires, l’absence partout d’interlocuteurs compétents ou expérimentés : l’explosion de cette sous-traitance enclenche une lente, mais inéluctable, dégradation de la performance collective.


Quand le doublement des cadences nécessiterait quasiment un doublement des effectifs spé fab, vous annonciez en juillet au dernier CSEC une ridicule augmentation d’effectif de l’ordre de 8%… en précisant déjà alors qu’elle serait difficile à tenir, rabaissant votre objectif à +5% !


Pour la CGT, outre le manque de volonté réelle, les difficultés de recrutement sont à mettre au compte des niveaux trop bas des salaires en face de l’exigence des qualifications et du niveau de technologie chez Dassault. Il se développe en France comme chez Dassault une curieuse propagande patronale selon laquelle l’ouvrier doit rester sous un plafond de verre salarial, quelle que soit sa qualification.


A ce constat industriel inquiétant, nous ajoutons une bien faible considération sociale pour les salariés Dassault. Si pour une majorité de cadres la situation demeure plutôt satisfaisante, pour tous les autres salariés la situation est amère.


L’archaïsme social de l’entreprise est aujourd’hui tellement flagrant que les services RH des établissements ne le nient même plus.


Plus personne ne comprend vos réticences permanentes à répondre aux aspirations du personnel. 4 longs mois de conflit dur ont été nécessaires pour obtenir une augmentation de salaire couvrant à peine l’inflation.


Et ce mois-ci encore, ce sont nos camarades de Dassault Falcon Service qui ont été contraints d’user des mêmes moyens pour obtenir leur dû… vous n’avez donc toujours pas compris la leçon !


Ne pensez-vous pas qu’il serait plus raisonnable, plus juste, et surtout plus efficace d’arrêter de déconsidérer ceux que vous nommez « non-cadres » ? Les ouvriers, les employés, les techniciens… ne sont pas des « non-quelque chose », comme une sous-catégorie de salariés ! Peut-être souhaiteriez que nous renommions nos collègues du premier rang les « non-manuels » ? ou alors les « non-habiles » ?

Votre logiciel social est archaïque et gagnerait à être remis à jour. Ce ne sont pas les revendications qui manquent :

  • Indexation automatique des salaires sur l’inflation
  • Semaine de 4 jours
  • Congés à libre disposition
  • Formation qualifiante permettant l’évolution professionnelle
  • Pré-retraite dès 55 ans pour les travaux pénibles
  • Embauches massives pour limiter drastiquement la sous-traitance et les heures sup’

Une politique sociale moderne et du 21éme siècle permettrait, sans aucun doute, d’inverser la tendance malthusienne actuelle. C’est en attirant les meilleurs talents avec des conditions sociales de haut niveau que l’entreprise se développera positivement. La CGT vous le répète une fois de plus : Sans investissements massifs dans l’Humain, pas d’avenir possible !

St Cloud, jeudi 20 octobre 2022.

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